Il y a des vidéos de Teahupo’o, et puis il y a celles qui marquent. Celle que vient de publier Barron Mamiya fait partie de cette catégorie. Et pourtant, soyons honnêtes : la plupart d’entre nous saturent un peu. Teahupo’o a été filmée sous tous les angles possibles, à toutes les heures du jour et de la nuit. Si on calculait la couverture médiatique des vagues du monde, on découvrirait probablement que 1 % des spots représentent 95 % des vidéos surf… (aucune donnée scientifique derrière cette affirmation, juste une intuition journalistique, disons-le).
Et pourtant, cette vidéo mérite le détour. Parce qu’elle capture non seulement la puissance brute de la gauche tahitienne, mais aussi sa beauté et son intensité émotionnelle, dans une journée qui restera gravée dans les mémoires.
Le 3 septembre 2025, Teahupo’o s’est réveillée dans toute sa splendeur. Une houle massive venue du sud-ouest a frappé la presqu’île de Tahiti, offrant des vagues de plus de quatre mètres parfaitement formées. Les locaux étaient là, bien sûr — Matahi Drollet, Eimeo Czermak, Lorenzo Avvenenti — mais aussi une poignée d’Hawaïens en visite : Barron Mamiya, Makana Pang, Noah Beschen.
Cette journée aurait pu être parfaite de bout en bout, si elle n’avait pas été marquée par un accident sérieux. Le surfeur tahitien Lorenzo Avvenenti a été victime d’un grave incident lors d’une session de tow-in. Retrouvé inconscient, il a été secouru par Matahi Drollet et d’autres surfeurs présents sur place. Heureusement, il est aujourd’hui hors de danger.
Ce drame rappelle la violence du spot : à Teahupo’o, chaque vague peut être la plus belle… ou la plus dangereuse de ta vie.
Parmi les surfeurs présents ce jour-là, Barron Mamiya a brillé par son aisance et sa précision. Pensionnaire du World Championship Tour (WCT), il fait partie de cette nouvelle génération d’Hawaïens qui mêlent puissance et élégance.
Sur cette vidéo, Barron ne surfe pas seulement Teahupo’o. Il danse avec elle. Ses take-offs sont d’une sérénité déconcertante, ses lignes épurées, ses sorties de tubes parfaites. À chaque vague, il semble flotter entre contrôle absolu et abandon total.
Teahupo’o est une vague de vérité, qui ne pardonne rien. Barron, lui, y trouve une forme d’équilibre, comme s’il y puisait une connexion entre peur, respect et beauté.
C’est aussi là que cette vidéo se distingue. Les ralentis signés Chris Bryan — l’un des maîtres de la caméra Phantom — ajoutent une dimension quasi mystique à l’ensemble. Chaque goutte d’eau semble suspendue dans le temps. Les plans en jet ski, qui suivent le surfeur au plus près, dévoilent l’épaisseur hallucinante de la lèvre, et rappellent à quel point cette vague est une bête vivante.
Le montage est simple, mais efficace. Pas de narration inutile, pas de musique envahissante. Juste du surf, de la lumière, et cette esthétique cinématographique que peu savent encore maîtriser sans tomber dans la surenchère.
Alors oui, encore une vidéo sur Teahupo’o. Mais celle-ci rappelle que le surf, quand il est vrai, n’a pas besoin d’inédit pour être bouleversant.
Teahupo’o, filmée mille fois, continue de fasciner parce que chaque session y est différente, chaque vague raconte une histoire, chaque surfeur y laisse un morceau de lui-même.
Barron Mamiya, ce jour-là, a simplement su écouter la vague. Et grâce à Chris Bryan, nous, spectateurs, avons pu la voir — et la ressentir — comme si c’était la première fois.