Pedro Henrique Mota Vianna, plus connu sous le nom de Pedro “Scooby”, est né le 10 août 1988 à Rio de Janeiro. Pour beaucoup, il incarne à lui seul une certaine idée du surf brésilien : libre, excessif, charismatique et profondément humain.
S’il n’est pas le plus titré des surfeurs de son pays, il en est sans doute l’un des plus authentiques, un de ceux qui ont choisi la voie la plus risquée : celle du freesurf et des vagues XXL.
Son premier contact avec la mer, c’est son père qui le lui offre, quand il a à peine cinq ans. Pourtant, son enfance ne ressemble pas à une carte postale de Rio. Son père est arrêté alors qu’il est encore enfant ; la responsabilité du foyer tombe sur ses épaules trop jeunes. « Tout aurait pu mal tourner, mais le surf m’a sauvé », racontera-t-il plus tard.
C’est à 11 ans que Scooby reprend le surf après plusieurs années loin de la plage. Très vite, il montre un talent instinctif, un goût du risque et une créativité hors norme. À 13 ans, il s’amuse déjà à tenter des aerials improbables — parfois même sans combinaison… ni maillot.
À 15 ans, il décroche son premier sponsor, une marque californienne séduite par son style explosif. Deux ans plus tard, il devient le premier Brésilien signé par Nike, un symbole fort dans un pays encore peu représenté sur la scène mondiale.
Mais Pedro ne veut pas du circuit classique. Il choisit une autre voie : celle du freesurf, des sessions sauvages, des voyages, de la recherche du moment parfait plutôt que du score parfait. Une décision rare à l’époque, mais qui définira toute sa carrière.
C’est au tournant des années 2010 que Pedro Scooby se rapproche du monde des grosses vagues. À Puerto Escondido, au Mexique, il se jette dans un swell monstrueux avec une planche empruntée. Résultat : l’une des vagues de la journée et une réputation qui explose.
En août 2011, alors qu’il est en lune de miel à Bora Bora, il demande à sa femme la permission de filer à Tahiti pour une raison que seuls les surfeurs peuvent comprendre : le Code Red d'un swell approche. À Teahupo’o, il se distingue avec une planche trop petite et une audace démesurée. Ce jour-là, le monde du surf XXL découvre vraiment Pedro Scooby.
Mais la route des chargeurs est toujours bordée de risques. En 2019 à Nazaré, il vit l’une des pires frayeurs de sa vie : percuté par sa planche, il est maintenu sous l’eau par plusieurs vagues. Il perd la vision pendant quelques secondes, mais reste conscient.
« Je ne voulais pas y aller ce jour-là. Il pleuvait, le vent était mauvais… Et pourtant, j’y suis allé. C’est la vie que j’ai choisie. »
Un touriste lui viendra en aide sur la plage. Scooby s’en sort indemne, mais profondément transformé.
Trois ans plus tard, en 2024, il revient à Nazaré en équipe avec Lucas “Chumbo” Chianca, et les deux Brésiliens remportent le Nazaré Big Wave Challenge. Une revanche sur le destin, et une consécration pour celui qu’on avait déjà surnommé le “fou du surf”.
Pedro Scooby, c’est un style à part : goofy-footer, toujours engagé, souvent imprévisible, parfois borderline. Il surfe avec le cœur, avec les tripes. Il se moque du format, des juges, des codes. Ce qu’il cherche, c’est la sensation pure — celle d’une vague qui peut tout lui prendre.
Élu meilleur freesurfer de l’année 2012 par le magazine Alma Surf, et lauréat du meilleur tube de l’année pour un ride historique à Teahupo’o, il devient rapidement une figure de la scène alternative.
En 2014, il apparaît dans la série Pedro Vai Pro Mar sur Canal OFF. L’année suivante, Nike produit une bande dessinée à son effigie, De Volta à Rotina (“De retour à la routine”), une première dans l’histoire du surf brésilien.
Mais Scooby ne se résume pas à un surfeur. Il est aussi une personnalité publique, un phénomène médiatique. En 2016, il participe à l’émission Saltibum (plongeon acrobatique), puis à Exathlon Brasil en 2017, où il termine deuxième.
En 2022, il entre dans la maison du Big Brother Brasil, et termine cinquième après 95 jours de confinement — la plus longue période de sa vie loin de la mer.
Cette notoriété dépasse le surf. Publicités, campagnes de mode, plateaux télé… Pedro Vianna devient une icône populaire au Brésil, sans jamais renier ses racines océaniques.
Il agace autant qu’il fascine. Pour certains, il symbolise l’excès ; pour d’autres, il incarne une liberté rare. Mais dans le line-up, personne ne doute de son engagement. Scooby reste un vrai surfeur, un chargeur capable de tout donner dans un tube à Nazaré ou dans une gauche mexicaine.
Côté personnel, Scooby a toujours vécu à fond. En 2013, il épouse la comédienne Luana Piovani, avec qui il a trois enfants : Dom, Bem et Liz. Le couple se sépare en 2019. Quelques mois plus tard, il vit une relation médiatisée avec la chanteuse Anitta, avant d’épouser la mannequin Cintia Dicker en 2020. Ensemble, ils accueillent une fille, Aurora, en 2022.
Derrière le buzz, il y a un homme profondément attaché à sa famille et à ses valeurs. Il revendique une éducation spirituelle, une approche détachée du matériel et une philosophie simple : vivre intensément, sans peur.
Aujourd’hui, Pedro Scooby ne se contente plus de charger des vagues géantes. Installé entre Rio et Lisbonne, il investit dans l’immobilier, les cosmétiques, les NFT, la crypto et même l’eau en canette. Son patrimoine est estimé à près de 4 millions de dollars.
Loin du cliché du surfeur fauché, il incarne une nouvelle génération de riders-entrepreneurs, capables de transformer leur notoriété en projets durables.
Il continue aussi d’apparaître dans des documentaires, des clips, et même dans des chansons : O Surfista e o Sambista, écrite par Rogê et Arlindo Cruz, lui rend hommage — preuve que Scooby a dépassé les frontières du surf pour devenir un symbole de la culture populaire brésilienne.
Pedro Scooby n’a jamais gagné de titre mondial. Il n’en a jamais vraiment voulu. Sa victoire, c’est d’avoir inspiré toute une génération de surfeurs à vivre le surf autrement : comme un art, une manière de respirer, de tout risquer sans calculer.
Son surnom, “Scooby”, vient d’un dessin animé, mais il aurait tout aussi bien pu venir de la culture punk ou du fado portugais. C’est un homme à contre-courant, imprévisible, sincère.
Dans un monde où tout se mesure, il reste l’un des rares à vivre sans chronomètre.
« Je suis un mélange de rock star et de moine zen », aime-t-il dire.
Et c’est sans doute cette contradiction qui fait de Pedro Scooby un personnage unique du surf mondial, un symbole du Brésil qui ne lâche jamais — même quand la vague semble trop grosse.