Un top shaper à la sauce Top Chef

19 octobre 2025

Et si les maîtres du rabot avaient droit à leur propre Top Chef ? Pas de cuisine moléculaire ni de jury de stars, mais de la poussière blanche, du bruit de râpe, et cette odeur d’époxy chaude qui flotte dans l’air. Bienvenue au Boardroom Show, le concours qui célèbre le savoir-faire des artisans du surf comme jamais auparavant.

Le Boardroom Show : le grand banquet du shape

Chaque année à Del Mar, en Californie, le Boardroom Show réunit les meilleurs shapers de la planète. L’idée est née après la fermeture de Clark Foam en 2005, un choc pour toute l’industrie. “Les shapers n’avaient plus de scène pour exposer leurs planches”, raconte Scott Bass, surfeur, journaliste et fondateur de l’événement. Alors il a décidé de créer un rendez-vous où les artisans reprennent leur place au centre de la culture surf — là où elle a toujours été.

Dans un immense hall baigné de lumière, les stands s’enchaînent : shapes old school, guns hawaiiens, fish modernes ou twin fins sculptés à la main. Mais ce n’est pas seulement un salon professionnel : c’est une célébration vivante du surfboard, un hommage à ceux qui transforment un pain de mousse en pur plaisir de glisse.

Icons of Foam : le Top Chef du shape

Le clou du spectacle, c’est l’Icons of Foam Shape-Off, une compétition où huit shapers s’affrontent sous les yeux d’un invité d’honneur. Le concept ? Reproduire à la main, en temps limité, une planche mythique du maître choisi. Cette année, c’est la légende hawaiienne Eric Arakawa qui jugeait les participants. Au menu : trois planches historiques, dont le gun de Waimea façonné pour Ronnie Burns en 1986, et surtout la board d’Andy Irons, celle de son titre mondial à Pipeline en 2003.

Chrono en main, deux artisans s’affrontent côte à côte. Les gestes sont précis, rapides, presque chorégraphiés. Le public retient son souffle, comme devant une finale de Top Chef. Et à la fin, c’est Dan Mann — shaper californien connu pour ses designs puissants chez Firewire — qui remporte le titre. “Winner winner, Nobu dinner”, plaisante Scott Bass. L’ambiance est bon enfant, mais le respect est total.

Le “British Bake Off” du surf

À côté de la compétition reine, le Boardroom Show propose un autre défi : le Best in Show, sorte de “British Bake Off” du surf. Les règles sont simples : chaque participant fabrique une planche sur un thème donné. Cette année : le fish revisité avec des accents de bois et un symbole personnel. Les créations sont ensuite soumises au vote du public. C’est Steve Farwell, de Newport Beach, qui remporte l’édition 2025 avec un fish incrusté de motifs familiaux, hommage à son grand-père charpentier.

C’est ce mélange d’artisanat, de passion et d’émotion qui donne à l’événement son âme. Un salon où l’on parle autant d’équilibre hydrodynamique que d’histoires humaines.

Et si on relançait ça en France ?

Depuis la disparition du Glissexpo, la France n’a plus vraiment de grand rendez-vous où shapers et surfeurs se croisent. Le Hotdogger de Biarritz fait vivre un esprit rétro et convivial, mais il manque un événement dédié au shape, à la création, au contact direct entre artisans et passionnés.

Imagine un instant un “Top Shaper France”, dans un hangar de la Côte Basque : Axel Lorentz, Chienville, Rob Vaughan, et des shapers internationaux... tous à l’œuvre, sous les yeux d’un public curieux, entre copeaux et histoires de surf trips. Une rencontre où l’on parlerait volumes, rails, et courbes comme d’art et de cuisine fine.

Le surf traverse une crise économique profonde : les marques souffrent, les shops résistent, mais la passion reste. Ce genre d’événement, humain et culturel, pourrait bien rallumer la flamme.

Derrière chaque vague parfaite, il y a une planche. Et derrière chaque planche, un artisan. Si le Boardroom Show a su transformer le shape en spectacle, il nous rappelle surtout une chose : le surf, avant d’être une industrie, est une culture. Une histoire de mains, de bois et de mousse. Et peut-être, bientôt, de concours… à la française.

On y était pas sur place, mais on aurait pu croiser S-Wings, la marque française de dérives surf.

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